Les Villages  "Nithart"

Eschentzwiller

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 Le nom a fluctué énormément au cours des âges (Sources: CDHF - Sté d'Histoire d'Eschentzwiller et de Zimmersheim) : Eschenzwillang, Aschenzwiller,Aschenzwüller, Echentzwiler, Echentzwill, Echersswil, Eschendlsweyllr, Eschendswyler, Eschenschweyller, Eschensviller, Eschensviller diocèse de Basle, Eschensweiller, Eschenswiler, Eschenswiller, Eschentsweiler, Eschentswyler, Eschentwiller, Eschentzveiler, Eschentzveiller, Eschentzweiler, Eschentzweill, Eschentzweiller, Eschentzweyler, Eschentzweyller, Eschentzwilensis, Eschentzwiler, Eschentzwilerana, Eschentzwileranus, Eschentzwyler, Eschenwiler, Eschenzweiler, Eschenzweiller, Eschenzweyler, Eschenzwiler, Eschenzwilerana, Eschenzwileranus, Eschenzwiller, Eschetswiler, Eschetswil im Sungow, Eschetzwiller, Eschezwilerana, Eshenzwiller, Estzwiller, Habshemiany, Äschentsweiler, Äschenzwiller, Öschenzwiller, Äschenzwüller, Habshemiany, soit 49 écritures différentes!

Ce village est le "berceau" de la famille NITHART

Séparé de Mulhouse par plusieurs collines et de vastes forêts, Eschentzwiller est un des rares villages sundgauviens établis sur une croupe entre 250 et 275 mètres d’altitude. Ce village est à moins de 10 klm de Mulhouse et de Riedisheim et à moins de 12 klm de Rixheim. Il a gardé un caractère rural et possède de nombreuses maisons du XVI et XVII ème siècle. On a identifié la maison construite en 1611 probablement par Henri Nithart. Plusieurs générations de Nithart, incluant Jean Jacques Nithart (premier Nithart à s’établir à Riedisheim) y ont habité. Une autre maison un peu plus récente ayant appartenu à la famille Nithart a également été identifiée récemment.

On a retrouvé à Eschentzwiller dans des strates géologiques superposées des aménagements et du matériel néolithique danubien, puis des stations chalcolithiques, puis à l’âge de fer, des établissements de La Têne I a+b et III. Des éléments gallo-romains ont également été retrouvés.

Après les Danubiens du néolithique (entre 2000 et 1800 avant J.C.) de nombreux vestiges de l’âge du bronze, principalement des épées, ont été retrouvées.

La première vague celtique (entre 750 et 450 avant J.C.) a laissé des tumuli et tertres funéraires. Entre 450 et 50 avant J.C. la population se densifia et se rassemblait dans des villages de cabanes qui mesurent 2,70m sur 4,70m. L’artisanat était en plein développement au premier siècle avant J.C. La céramique et la joaillerie prospèrent, de même que l’artisanat textile et l’agriculture. Il semble qu’à cette époque les Cektes du Haut Rhin participent au vaste courant culturel recouvrant les plateaux de la Suisse toute proche. Des sépultures mérovingiennes ont été récemment trouvées.

Le nom le plus ancien connu pour Eschentzwiller est celui de Azolvesvilre cité en 824. Ce nom voudrait dire "ferme d’Azolf, du vieil allemand asc: bois de lance et olf: loup. On trouve également Ascholtesvilre au IXI ème siècle et Escholsviller au XIII ème. Etant donné le caractère anarchique de l’orthographe (voir également les variantes du nom Nithart) on trouve Escholzweiler en 1377, Escholtzwilr en 1441, Escholzweiler en 1466, Eschwilr en 1481, Eschentzwiller en 1483, Escholzwilr en 1488, Escholtzwiller en 1489, Eschelzwylen en 1498, Eschezwylen etc. Au XVI ème, idem: Eschentzwiller en 1575, Eschetzweiler en 1576 etc. Au XVIII ème, l’orthographe se fixe sur Eschentzwiler avec quand même des variantes telles que Aeschenzweiler en 1724.

Depuis la révolution, on dit Eschentzweiler en allemand, Eschentzwiller en français et Aschetzwiller en alsacien.

Il y a de nombreuses hypothèses quant à l’origine du nom de ce village: certains prétendent que la syllabe "asch" vient de l’allemand et signifie cendre car un jour le village aurait été réduit en cendre par un incendie. D’autres se basent sur le mot "esche" qui veut dire frêne. Quant à "vilr, willer, weiler, la plupart des linguistes actuels y voient des villages d’origine germanique.

Les francs occupèrent l’Alsace après la bataille de Tolbiac en 496. Les villages à prédominance  franque le long des grands axes se terminent en "heim". Les villages plus retirés, surtout dans le Sundgau, se terminent en Willer ou en ingen. Eschentzwiller tiendrait donc son nom de colonies alamanques.

Au XI ème siècle, Eschentzwiller appartient au premier noyau territorial autour duquel se sont développées les possessions des Habsbourg (dynastie descendant des Eticonides, ducs d’Alsace sous les Mérovingiens) Le village dépendait alors de Landser dont l’évêque de Bâle avait inféodé vers 1240 les nobles des Butenheim. En 1269, Rodolphe de Habsbourg acheta le fief aux Butenheim et devint, entre autre, propriétaire d’Eschentzwiller. Après 1269, Rodolphe donna la Seigneurie de Landser en fief aux nobles de Trothofen. Le village d’Eschentzwiller fut engagé pour 10 Mark aux frères Trothofen. Malgré de nouveaux impôts, les fermiers et colongers ont conservé l’essentiel de leur statut de cultivateurs libres..

Les chevaliers von Trothofen restèrent inféodés de la seigneurie de Landser de 1269 à 1322. En 1322, le fief passa à Johann Ulrich von Hus.. Ce fut par héritage que les biens des Huse passèrent un siècle plus tard aux comtes d’Andlau. Walter d’Andlau avait épousé la fille de Hartung de Huse et hérita de ce dernier à sa mort en 1419. Landser et donc Eschentzwiller restèrent un fief des Habsbourg jusqu’en 1648. A partir de l’époque française et jusqu’en 1789 la Maison d’Andlau gouverna Eschentzwiller.

C’est à l’occasion de la passation du fief à Johann Ulric de Hus, que l’on trouve un acte de limite de propriété fait par Nicolas de Hus qui cite Hans NITHART comme témoin avec 4 autres notables d’Eschentzwiller. Sachant que le droit coutumier prévoyait de faire appel à des témoins âgés pour ce genre de témoignage, Hans avait peut-être entre 70 et 90 ans à ce moment là, ce qui donnerait une fourchette de 1230 à 1250 pour la date de naissance de Hans. Cette estimation d’âge n’est pas invraisemblable: Clewin NITHART cité sur un acte concernant la nature des droits de haute justice des nobles d’Andlau le 8 Mars 1481 avait 80 ans!

Quand on sait que la commune d’Eschentzwiller était dotée d’un tribunal et même d’un haut tribunal dans "l’officium" de Landser, on imagine l’autorité et la liberté dont a pu jouir le village. Quand les Andlau eurent repris le gouvernement des terres des Huse, après 1419, et eurent fixé leur résidence à Hombourg, ils établirent leur tribunal à Eschentzwiller et lui accordèrent le droit à la potence, donc de juger les affaires capitales. Désormais, tous les villages andlauviens, y compris Wittenheim, Kingersheim, Niffer, Laudau etc auront à soumettre leurs différents au tribunal d’Eschentzwiller.

Ceci dura jusqu’à la Révolution. En effet, jusqu’au XVIII ème siècle, tous les villages andlauviens (Wittenheim, Kingersheim, Obersaasheim,Hombourg, Petit-Laudau, Niffer et Zimmersheim) relevaient encore du tribunal d’Eschentzwiller, constitué en "département" dirigé par un bailli. Cet office faisait partie de la subdélégation de Ferrette. Eschentzwiller était la résidence d’un notaire, d’un juge de paix, d’un huissier de justice, d’un greffier, d’un médecin, d’un garde général des Eaux et Forêts, d’un intendant à la gabelle.

La Révolution sonna le glas de la prééminence d’Eschentzwiller sur les autres villages andlauviens.

Le Conseil Souverain d’Alsace, en 1730, donna un aperçu des droits seigneuriaux des d’Andlau à Eschentzwiller: la haute et basse justice, confiscation, successions de bâtards, biens vacants, trésors cachés, gabelles, impôts (un demi florin sur chaque mesure de vin), amendes, droits de bourgeoisie, florins d’héritage, droits de transmigration, 8O livres de taille, 42 réseaux d’avoine, la poule du carnaval, 3 rézeaux de seigle de rente foncière sur le moulin d’Eschentzwiller; les habitants étaient aussi obligés d’aider à la chasse....

En 1466, éclata la guerre des 6 deniers entre Mulhouse soutenue par Berne et Soleure et les Autrichiens qui possédaient tout le Sundgau et qui voulaient également occuper Mulhouse, ville libre d’Empire. Au cours de cette guerre, Eschentzwiller fut incendié par les Suisses, mais devait renaître des cendres grâce à l’énergie des habitants.

On est sûr de l’existence en 1191 d’une église à Eschentzwiller desservie par les chanoines de Saint-Amarin. Un bon siècle plus tard on y trouve une église gothique dont le clocher est encore roman et qui subsiste encore de nos jours. Quand les Andlau acquirent la suzeraineté sur Eschentzwiller en 1419, ils nommèrent un chapelain. Son successeur en 1444 fut Henri d’Andlau, également chanoine à Bâle.

St Yves fut un avocat breton canonisé en 1347. un siècle avant d’être honoré à Eschentzwiller (seul endroit en Alsace). Il n’est pas étonnant que les Andlau, ayant fait d’Eschentzwiller leur tribunal, aient voulu aussi promouvoir le culte d’un homme de loi.

Les registres paroissiaux ne débutent qu’en 1581. avec les registres de baptême et celui des mariages. L’enregistrement des décès ne débute qu’en 1585, tous les trois réunis sur un même volume intitulé " Kirchbuch dem lobligen Gotshaus Petri et Pauli zu Eschenzweiler derselbigen Gemein zugehörig Andlowischen Herrschaft, angefangen im ablaufenden 1581 jahr. Es waren regierende Herren zu Wittenheim die gestr. Edlen Lazarus, Sigmund, Jakob, alle von Andlow in dene name regierende Schultheiss zu Eschenzweiler der gelehrte Herr Adam Krafft".

Ceci explique pourquoi on ne peut justifier l’existence de certains Nithart que par leur citation sur des actes comme témoins, parrains ou autres, par absence de registre paroissial antérieur à 1581.

Eschentzwiller défendit au XVI ème siècle et pendant la révolution ses droits immémoriaux d’exploitation et de pacage que la communauté tirait de son appartenance à la "markgenossenschaft" des communes riveraines de la Hardt, dans la portion de cette forêt dite "vogelholtz". Déjà en 1517, une controverse s’éleva entre les Andlau et Eschentzwiller au sujet du droit d’usage des forêts. Le différent s’amplifia après la guerre des paysans lorsque la seigneurie de Landser voulut soustraire le "vogelholtz" à l’usage d’Eschentzwiller. Après 10 ans de procédure, Eschentzwiller eu gain de cause, mais l’affaire traîna en longueur.

Fort d’une longue habitude de discussion des exigences des seigneurs, la communauté d’Eschentzwiller décida unilatéralement de garder pour elle après 1525 une part de la dîme. Au XVIII ème siècle, il lui arrivait encore de refuser purement et simplement le paiement de la dîme!

Eschentzwiller semble offrir l’image d’une communauté plus frondeuse que les autres. En fait, la commune n’a fait que défendre des intérêts légitimes, face aux usurpations des administrations centrales successives.

Fut-ce un hasard alors, si le bourg se trouvait être, en 1525, l’un des foyers, dirigé par Matthis NITHART, de l’insurrection paysanne du Sundgau? (voir la partie consacrée à la guerre des paysans).

La commune connut de nombreux troubles au fil du temps. Les principaux sont:

- 1444, Destruction et pillage par les Armagnacs du futur Louis XI pour compenser l’absence de solde.

- 1468, incendie du village par les Confédérés.

- 1589, occupation et pillage par les Lorrains.

- Guerre de trente ans (1618-1648) Les années le 1632 à 1640 furent les plus éprouvantes pour Eschentzwiller, déserté par la plupart de ses habitants, suite à l’occupation par les Suédois.

- Guerre de Hollande (1672-1679) réquisitions et occupations se succédèrent. Un camp y fut établi par Turenne en Mai et en octobre 1674. La population s’enfuit à Mulhouse.

- Révolution, De vives tensions politiques et religieuses déchirèrent le village après la transformation de l’église en magasin à fourrage.

- 1939-1945, la population fut évacuée dans le Lot-et-Garonne (Laparade) du 17/5 au 27/09/1940. Peu de destruction pendant et à la fin de la guerre.

Économie et population - Eschentzwiller aujourd’hui:

Si la viticulture était florissante dès le XIV ème siècle avec des exportations vers la Suisse et l’Allemagne, elle déclina à partir du 17ème siècle. En 1878, il restait encore 26 hectares. En 1976, il n’en restait plus que 5.

On ne compte plus en 1980 que 6 exploitations vivant exclusivement de l’agriculture, soit 3,9% des actifs..

En 1851, il existait 3 moulins et une tuilerie ainsi que quelques foulons de chanvre, des carrières, des sablières. en 1895, on y rencontrait des fours à chaux, une tuilerie et un moulin à huile.

En 1922, Charges Mieg de Mulhouse installa une petite entreprise de bobinage qui fabriquait pendant la seconde guerre mondiale des tabliers et des blouses pour les établissements Jöde de Stuttgart.

Après la guerre, Haccour, un Belge, établit dans les locaux de Mieg une entreprise de confection qui employait une trentaine de femmes. Plus tard , Boemert créa une fabrique d’interrupteurs et de matériel électrique (1949-1963).

En 1979, on compte à Eschentzwiller: 1 restaurant, 1 épicerie, 1 boucher, 1 dancing employant 10 personnes, 1 menuisier, une entreprise de traitement des eaux et une petite entreprise de transport.. Il y a également deux petits établissements industriels: une entreprise de construction et une de carrelage.

La population d’Eschentzwiller très durement touchée pendant la Guerre de Trente Ans comptait encore 305 habitants en 1659. En 1700, elle monte à 400, a 500 en 1732, 700 en 1757, 680 en 1801, 980 en 1866. L’exode rural produisit ses effets et on constate une forte réduction du nombre d’habitants: 547 en 1954. Depuis, il y a eu une remontée: environ 950 personnes en 1980.

Il est intéressant de noter le nombre moyen d’enfants par couple selon les périodes: 1666:3; 1700-1730: 6; 1740-1760:10; 1760-1770:7 à 5.

Le réseau d’eau potable date de 1957. Le collecteur d’eaux usées de 1979.

Aujourd’hui, l’activité est principalement tournée vers le secteur tertiaire. Les grandes entreprises de la région (Peugeot à Sochaux et surtout Mulhouse) constituent les principaux pôles d’emploi. Eschentzwiller semble résister au déséquilibre et rechercher, par une croissance plus modérée, voire contrôlée, une harmonie compatible avec son cadre et sa riche histoire.

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